Comparativement à l’ancienneté des civilisations présentes sur ce continent, la planification en Afrique est relativement récente. Menée dans un premier temps à l’échelle nationale, elle date des années post-coloniales et est liée à l’indépendance des pays africains. Cette planification a été nécessaire pour l’organisation des mutations structurelles des territoires, notamment les effets de la croissance démographique, de l’explosion urbaine, les besoins sociaux, etc. Les décideurs ont ainsi eu besoin d’éclairages pour la planification des infrastructures, des investissements, de la santé, de l’éducation ou encore de l’aménagement du territoire.

Les débuts de la planification en Afrique ont connu plusieurs phases, à la recherche d’un modèle optimal de développement. Malgré diverses tentatives, et si plusieurs domaines restent à améliorer, cette planification du développement semble être en bonne voie.

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Retour sur l’émergence de la planification dans les pays africains

La planification, qui a été mise en œuvre au lendemain de la secondaire guerre mondiale par les puissances coloniales, consistait en une planification centralisée, articulée autour de plans d’une durée de 3 à 5 ans. A cette période, plus d’une trentaine de pays s’étaient dotés d’un plan de développement national. C’est l’époque des entreprises d’Etat. Néanmoins, ces premiers plans étaient très formels, basés sur des modèles des pays colonisateurs. Il existait de ce fait un décalage entre ces schémas « idéaux  types » de la planification et les pratiques du quotidien. Ces plans manquaient par ailleurs de systèmes d’informations fiables, consistaient en de simples catalogues de projets souvent mal évalués et non hiérarchisés, sans cadrage macroéconomiques. Enfin, l’inefficacité de l’économie administrée et un gaspillage des ressources liées à l’intervention de l’état ont amené à la création de dettes. De fait, la stratégie était axée sur la croissance créée par l’investissement alors que la planification des ressources humaines et de l’éducation, comme préalable, a été largement absente des premiers plans de développement.

S’en suivi alors une deuxième phase dans l’évolution de la planification, ou plutôt un abandon de la planification au profit du développement de programmes « d’ajustement structurel ». Ils avaient pour objectif de réduire le rôle de l’Etat dans la production et les services, et de mettre l’accent sur la stabilité macroéconomique, la réduction de la taille du secteur public et les privatisations. Ces programmes ont conduit à une perte d’emplois importante et n’ont pas eu les résultats escomptés en matière de croissance économique et de réduction de la dette.

Au début des années 2000, ces programmes d’ajustement structurels sont eux aussi abandonnés au profit des stratégies pour la réduction de la pauvreté (DSRP). Ces dernières étaient basées sur la réduction de la pauvreté comme condition de l’allégement de la dette. Cependant, l’importance disproportionnée accordée au secteur social au détriment du système productif a mis en péril la durabilité du programme.

Des améliorations nécessaires

Une réforme de la planification est donc nécessaire afin que celle-ci gagne en efficacité. Il s’agit en premier lieu d’améliorer les systèmes d’information. En effet, l’efficacité des systèmes nationaux de planification dépend dans une grande mesure de la qualité et de la disponibilité de données statistiques, qui facilitent la détermination des priorités et le suivi des résultats obtenus. Ensuite, des priorités de développement doivent être fixées en fonction des besoins et des moyens, plutôt qu’un simple catalogue de mesures.

Un autre aspect à améliorer est la coordination et la centralisation : coordonner les ministères des finances et ceux responsables de la planification du développement afin de garantir une mise en œuvre efficace des plans nationaux de développement. Il s’agit également de centraliser la documentation, comme l’a fait la Commission Economique pour l’Afrique des Nations Unies (CEA) via la création d’un réseau de spécialistes de la planification comportant une plate-forme électronique de centralisation des données. Ces améliorations sont en cours et certains pays font preuve de beaucoup d’ambition dans leurs projets de développement.

Une planification africaine en bonne voie ?

Aujourd’hui, avec l’aide notamment de financements extérieurs, une nouvelle forme de planification est initiée en Afrique : une planification non plus nationale mais locale, permettant d’appréhender de nouveaux enjeux, plus ciblés que l’économie nationale ou l’éducation. Les villes africaines se voient de plus en plus dotées de documents d’urbanisme et de planification à l’échelle de la ville : master plan, plan directeur d’urbanisme, et même POS et Agenda 21. A l’heure où les villes africaines attirent et voient leur population exploser, les enjeux urbains sont complexes et doivent être appréhendés à une échelle adaptée au territoire et à sa population : mobilité urbaine, gestion des déchets et de l’assainissement, occupation de l’espaces publics, etc.

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Cependant, n’est-on pas en train de retomber dans les travers du passé, qui ont consisté à tenter d’appliquer des méthodes françaises ou européennes à des problématiques africaines ? Economie informelle, importance de la religion dans la gestion du territoire, etc. les problématiques, les approches, les enjeux, les priorités diffèrent entre nos villes et les villes africaines, mais également entre les différentes villes des pays d’Afrique.

Marie Caspar